Hoi An, pas de côté
Le monde entier semble s’être passé le mot pour faire d’Hoi An le point d’orgue d’un voyage au Vietnam. Ouvrez un guide de voyage, feuilletez un magazine, perdez vous dans les méandres du net, interrogez n’importe quel voyageur, vous verrez que chacun n’a qu’un mot (ou deux syllabes) à la bouche : Hoi An. Hoi An en dix incontournables. Hoi An cité UNESCO. Hoi An capitale gastronomique. Hoi An paradis des tailleurs et de l’artisanat. Hoi An terrain de jeu photographique. Hoi An intemporelle. Hoi An à toutes les sauces.
Alors un jour nous aussi on se retrouve à Hoi An, à vélo au petit matin, sous le timide soleil de mars. Tour dans le marché, quelques pas le long de l’eau : les rues que l’on pensait livrées à la torpeur matinale sont parcourues par des dizaines de voyageurs tout aussi matinaux et tout aussi désireux de capturer l’âme de l’ancienne cité portuaire avant que les foules ne s’en emparent. Plus on s’enfonce dans les ruelles de la vieille ville et plus se développe un sentiment étrange : Hoi An est connue avant même d’y mettre les pieds. Les rangées de lampions colorés, la glycine courant le long des murs jaunes, les façades coloniales, les balustrades ouvragées, les boiseries des temples, le pont couvert japonais, la peinture écaillée, les bougainvilliers débordant sur les trottoirs, les vélos et chapeaux coniques figés dans leur course… Tout a déjà été vu. Montré. Photographié sous tous les angles. Tout ce qui fait d’Hoi An Hoi An.
Alors presque aussi rapidement que l’on est venu, on enfourche le vélo et l’on repart en sens inverse. Persuadés que, pour apprécier Hoi An, il faut commencer par s’en libérer. Se débarrasser du nom, de l’image et des inventaires à la Prévert. Délaisser les lumières – des lampions – de la ville. Inventer pour Hoi An une autre histoire, loin des ruelles du vieux centre.
Une histoire qui s’écrirait le long des routes filant vers la plage, dans les jardins maraîchers de Tra Que ou dans les rizières encerclant la ville. Qui se déploierait sous le chant des oiseaux, dans les ruines de l’ancien royaume Champa de My Son, au point du jour. Du côté de Cam Kim, à la sortie de l’école, ou dans les villages de l’île étourdis par le soleil de midi. Entre les tours de guets perdues dans la brume. Une histoire de langueur campagnarde.
Et d’autres aventures encore : cheveux livrés aux coups de ciseaux du coiffeur local, opticien capable de refaire une paire de lunettes en 30 minutes à peine, banh mi engouffrés à n’importe quelle heure de la journée, coupure d’électricité générale et Hoi An qui se redécouvre à la lueur des téléphones.
Hoi An, quoi qu’on en dise, s’écrit bien de manière plurielle.
Pour aller plus loin
Hoi An tire son charme de son cadre particulier, en bordure de fleuve et à deux pas de la mer, dans un coin de campagne préservé des grands travaux et de la pollution. La ville fut pendant des siècles un port de première importance en Asie du Sud-Est, jusqu’à ce que l’ensablement du fleuve Thu Bồn, à la fin du XIXe siècle, ne vienne entraver l’accès des navires aux docks. De ce passé commerçant la ville a conservé un patrimoine formidable mêlant demeures bourgeoises, temples bouddhistes, maisons de marchands japonais et maisons communes des congrégations chinoises.
Un pass donne accès à cinq lieux de la ville. Si le pont couvert japonais est en théorie accessible uniquement via ce billet combiné, la visite est libre au petit matin. Pour le reste, le choix est grand : maison de la congrégation du Fujian, maison Tan Ky, maison Quan Thang, maison commune de la congrégation de Hainan ou de la congrégation de Chaozhou…
Hors billet combiné, le petit musée ouvert par le photographe Réhahn, consacré aux 54 minorités ethniques du pays, vaut clairement le détour.
Situé au cœur d’un cirque montagneux, My Son était le principal centre intellectuel et religieux du royaume du Champa. Le lieu, « domaine réservé » du dieu hindou Shiva, servait de sépulture aux monarques. Progressivement délaissés à partir du XIIIe siècle, les temples de My Son comptent aujourd’hui parmi les plus beaux vestiges de l’ancien royaume. Il n’en reste pourtant qu’une poignée. Redécouverts à la fin du XIXe siècle par les archéologues, nombre d’entre eux avaient résisté aux caprices du temps et affichaient un état de conservation assez exceptionnel. 70 ans plus tard, les bombes américaines faisaient – volontairement – voler en éclat une bonne partie du site…
My Son est accessible en tour organisé depuis Hoi An. Mais si vous vous sentez à l’aise à scooter, la route qui mène au sanctuaire vaut presque autant le détour que la visite en elle-même (comptez 1 heure 15 à 1 heure 30). Certains tronçons sont moins agréables que d’autres, mais toute la première partie du trajet est splendide. Vous trouverez des informations détaillées sur le parcours ici. Un conseil, partez tôt ! Les groupes arrivent généralement sur le coup de 9 h.
Visiter Hoi An : quelques informations pratiques
UNE CHAMBRE
Bien sûr il est possible de loger à Hoi An même. Mais comme visiter Hoi An ne se limite pas à la vieille ville, le mieux est encore de quitter le centre pour se poser du côté des rizières. Tout se rejoint en quelques coups de pédales. On s’est installé au Hoi An Rustic Villa (excellent) mais en matière d’hébergement, l’offre est réellement pléthorique.
DÉCOUVRIR LA CUISINE D’HOI AN
Se lancer dans un food tour ou un cours de cuisine permet de s’approprier la cuisine locale. Restez quelques jours dans la région, prenez votre temps et vous verrez que chaque repas est une fête : bánh mì, white roses, bánh xèo, cao lầu… La ville compte une multitude d’excellents restaurants – parmi lesquels Orivy et Red Dragon – avec des déclinaisons végétariennes possibles pour la majorité des plats. Côté bánh mì deux institutions : Phi Banh Mi et Banh Mi Phuong.
VOYAGER DEPUIS/VERS HOI AN
Pas de gare ou d’aéroport à Hoi An. Il faut donc rejoindre Đà Nẵng, à une trentaine de kilomètres au nord de la ville (25 000 VND en bus). Une option intéressante peut être de passer par Easy Rider ou, avec un budget plus resserré, par un bus touristique type TNT Travel. La formule vaut le coup pour se rendre sur Huế. En fonction du parcours choisi, vous pourrez vous arrêter aux Marble Mountains à Đà Nẵng, au Hai Van Pass, à la plage de Lăng Cô, au bord de la lagune ou faire un crochet par le vieux pont couvert de Thanh Toan, à quelques kilomètres de Huế.
Hoi An – mars 2019